Et voici le quatrième numéro de la Revue poétique et picturale Les Amis de Thalie, dirigée par Nathalie Lescop-Boeswillwald, un hors-série Printemps 2023.
Y figurent 4 de mes nuanciers publiés sur ce blog il y a quelques mois.
Et j’ai choisi pour vous le poème d’Ara Alexandre Shishmanian, intitulé Le son de la musique.
Les Amis de Thalie , revue poétique et picturale dirigée par Nathalie Lescop-Boeswillwald, nous offre cette semaine sa vingt-troisième anthologie de la poésie humaniste.
Y figurent deux de mes poèmes: La poésie est une maison et La poésie n’épouse les contours de rien.
Parmi les nombreux poèmes inspirés de ce beau recueil, j’ai choisi de vous offrir Autoportrait de Michel Stavaux.
Est paru simultanément un magnifique numéro spécial de 63 pages intitulé La parole retrouvée dont l’avant-propos de Nathalie, ci-dessous, donne le ton.
Y figurent deux de mes poèmes.
Parmi tant de beaux écrits, j’ai choisi ce poème de mon amie Jeanne Champel -Grenier, intitulé
Avec l’amour dedans:
Je vous invite donc vivement à découvrir cette magnifique revue qui n’existe qu’en version papier.
Parce qu’il n’y a pas que le foot dans la vie, pour remercier aussi ceux qui me lisent quotidiennement et qui regardent dans la même direction que moi…Ces quelques mots d’Annie Ernaux, prononcés avant la remise de son prix Nobel ce 07 décembre à Stockholm.
. Dans le monde actuel, où la multiplicité des sources d’information, la rapidité du remplacement des images par d’autres, accoutument à une forme d’indifférence, se concentrer sur son art est une tentation. Mais, dans le même temps, il y a en Europe – masquée encore par la violence d’une guerre impérialiste menée par le dictateur à la tête de la Russie – la montée d’une idéologie de repli et de fermeture, qui se répand et gagne continument du terrain dans des pays jusqu’ici démocratiques. Fondée sur l’exclusion des étrangers et des immigrés, l’abandon des économiquement faibles, sur la surveillance du corps des femmes, elle m’impose, à moi, comme à tous ceux pour qui la valeur d’un être humain est la même, toujours et partout, un devoir d’extrême vigilance.
“Moi j’aime tant tout ce que j’aime! Si tu savais comme j’embellis tout ce que j’aime ! Et quel plaisir je me donne en aimant ! Si tu pouvais comprendre de quelle force et de quelle défaillance m’emplit ce que j’aime…C’est cela que je nomme le frôlement du bonheur ». Extrait des Vrilles de la vigne de Colette.
C’est à ces phrases de Colette que j’ai pensé en refermant Planète solaire, L’instant s’égoutte de Jeanne Champel Grenier.
Pour lire la recension, c’est ici, chez Couleurs Poésies 2, le très beau blog poétique de Jean Dornac…
Je l’ai vue suspendre, dans un cerisier, un épouvantail à effrayer les merles, car l’Ouest, notre voisin, enrhumé et doux, secoué d’éternuements en série, ne manquait pas de déguiser ses cerisiers en vieux chemineaux et coiffait ses groseilliers de gibus poilus. Peu de jours après, je trouvais ma mère sous l’arbre, passionnément immobile, la tête à la rencontre du ciel d’où elle bannissait les religions humaines… – Chut !… Regarde… Un merle noir, oxydé de vert et de violet, piquait les cerises, buvait le jus, déchiquetait la chair rosée… – Qu’il est beau !… chuchotait ma mère. Et tu vois comme il se sert de sa patte? Et tu vois les mouvements de sa tête et cette arrogance? Et ce tour de bec pour vider le noyau? Et remarque bien qu’il n’attrape que les plus mûres… – Mais, maman, l’épouvantail… – Chut !.. L’épouvantail ne le gêne pas… – Mais, maman, les cerises !.. Ma mère ramena sur la terre ses yeux couleur de pluie: – Les cerises ?.. Ah ! oui, les cerises…
[…] Le merle était parti, gavé, et l’épouvantail hochait au vent son gibus vide.
Il parlait à la chatte qui, l’œil vide et doré, atteint par l’odeur démesurée des héliotropes, entrouvrait la bouche, et manifestait la nauséeuse extase du fauve soumis aux parfums outranciers..
Elle goûta une herbe pour se remettre, écouta les voix, se frotta le museau aux dures brindilles des troènes taillés. Mais elle ne se livra à aucune exubérance, nulle gaîté irresponsable, et elle marchait noblement sous le petit nimbe d’argent qui l’enserrait de toutes parts.
« Oh ! la jolie fleur dans la vitrine ! – Oui. C’est un petit pavot blanc. – Je vous parle pas des petits pavots, je vous montre la fleur d’en bas, tachetée de clair et de sombre, veloutée, avec deux gouttes de rosée qui brillent, et de grandes étamines blanches pointues… Tiens, je me trompais : ce n’est pas une fleur, c’est un chat. – Non, non, vous aviez raison, poète: c’est une fleur. »
Vous me demandez de venir passer une huitaine de jours chez vous, c’est à dire auprès de ma fille que j’adore. Vous qui vivez auprès d’elle, vous savez combien je la vois rarement, combien sa présence m’enchante, et je suis touchée que vous m’invitiez à venir la voir. Pourtant, je n’accepterai pas votre aimable invitation, du moins pas maintenant. Voici pourquoi : mon cactus rose va probablement fleurir ! C’est une plante très rare, que l’on m’a donnée, et qui, m’a-t-on dit, ne fleurit sous nos climats que tous les quatre ans. Or, je suis déjà une très vieille femme, et, si je m’absentais pendant que mon cactus rose va fleurir, je suis certaine de ne pas le voir refleurir une autre fois…
Veuillez donc accepter, Monsieur, avec mon remerciement sincère, l’expression de mes sentiments distingués et de mon regret. »
Ce billet signé Sidonie Colette née Landoy, fut écrit par ma mère à l’un de mes maris, le second. L’année d’après, elle mourait, âgée de soixante-dix sept ans. Au cours des heures où je me sens inférieure à tout ce qui m’entoure, menacée par ma propre médiocrité, effrayée de découvrir qu’un muscle perd sa vigueur, un désir sa force, une douleur la trempe affilée de son tranchant, je puis pourtant me redresser et me dire : « Je suis la fille de celle qui écrivit cette lettre, -cette lettre et tant d’autres que j’ai gardées. Celle-ci en dix lignes, m’enseigne qu’à soixante seize ans elle projetait et entreprenait des voyages, mais que l’éclosion possible, l’attente d’une fleur tropicale suspendait tout et faisait silence même dans son coeur destiné à l’amour. Je suis la fille d’une femme qui, dans un petit pays honteux, avare et resserré, ouvrit sa maison villageoise aux chats errants, aux chemineaux et aux servantes enceintes. Je suis la fille d’une femme qui, vingt fois désespérée de manquer d’argent pour autrui, courut sous la neige fouetttée de vent crier de porte en porte, chez des riches, qu’un enfant, près d’un âtre indigent, venait de naître sans langes, nu sur de défaillantes mains nues… Puissé-je n’oublier jamais que je suis la fille d’une telle femme qui penchait, tremblante, toutes ses rides éblouies entre les sabres d’un cactus sur une promesse de fleur, une telle femme qui ne cessa elle-même d’éclore, infatigablement, pendant trois quarts de siècle… »
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