Et tant d’étoiles pour rêver / Huile de Francine Hamelin accompagnée de mon poème.

Tant d’étoiles pour rêver / Une huile de Francine Hamelin

Et Francine Hamelin c’est ici

il y a tant d’étoiles pour rêver

et j’ai mis tant de temps à comprendre

que la nuit n’était pas le contraire du jour

mais une réalité tremblante

pareils l’espace que nous battons

d’une seule tempe

et le timbre délicat du silence

dans l’enfant illimité

qu’on appelle aussi Amour

voici venu le temps des mains

et celui du projet sous la peau

voici venus l’aile de lumière

et le pendule de l’extrême feuillage

dans l’arythmie du cœur maladroit

on peut désormais atteindre en soi

le sol sauvage où la ronce fleurit

contre la bête craquante

coucher des prémices de douceur

et trouver au sein de cette meute bleue

sa propre étoile de rémission

soudain levée jusqu’au sourire

Barbara Auzou

Saison de multiples soleils / Une aquarelle de Francine Hamelin accompagnée de mon poème.

Saison de multiples soleils / Aquarelle et encre métallique / Francine Hamelin

Et Francine Hamelin c’est ici


nous

comme toux ceux qui vivent

contre le vent

et qui s’émeuvent d’un goût 

de l’ordre froidement contagieux

nous les condamnés sans preuve

en résidence ouverte sous leurs paupières

connaîtrons pourtant l’allégeance de  soleils sincères

l’or bleu d’une inexplicable ressemblance

et dans la profondeur d’un temps multiplié

les fruits tiendront la main de l’été

comme une chose de haute importance

nous soufflerons l’air chaud dans la bête froide de l’hiver

les oiseaux ne faneront pas cette année 

je te le promets

les rayons voués à la roue donnent la tétée 

à une lumière toute neuve

par la grâce d’un alphabet vertical

nous soulèverons le troupeau colossal

que nous avons fait naître de nos mains

de douceurs entrechoquées

entre mots et mûriers

de saisons en saisons et d’hier à demain

nous recommencerons sans cesse notre naissance

Barbara Auzou

Ô cœur du printemps / Une aquarelle de Francine Hamelin accompagnée de mon poème

Ô cœur du printemps / Une aquarelle de Francine Hamelin

Et Francine Hamelin c’est ici

vivre s’écrit dans des bras bleus

et dans l’ardeur largement dispensée

tout autour

qui essaient des rythmes 

qui essaient des danses

jusqu’au fond de nos yeux

je te parlerai dans un soleil

qui prend son temps

de ces oiseaux d’aubes à la voix de défi

de promesses et de festins

ces oiseaux tellement heureux de t’avoir trouvée

dans cet arrivage d’air frais

bifurquant

jusqu’à l’ultime cercle

que sur les abords doucement vallonnés de ton âme

 ils déplacent leurs foyers brûlants

d’une saison à l’autre

tu sauras aussi la grande humilité

de la petite fleur

 sa fantaisie qui ne demande qu’à vivre

dans une prairie rincée d’amour

printemps ce pays qui aime nos rêves

par le geste appris 

jusque dans l’eau réjouie et sans retour

printemps cette mélancolie qui finit bien 

et galope sur sa crête

Barbara Auzou 

Shaman aux arbres / Une aquarelle de Francine Hamelin accompagnée de mon poème

Shaman aux arbres / Une aquarelle de Francine Hamelin

Et Francine Hamelin c’est ici:


il y a toujours un arbre

pour se donner à l’homme fatigué

pour soutenir à coups d’amour

son chant lancé jusqu’au démantèlement

un arbre qui sait et pardonne tout

les fougues par brassées dans les méandres du temps

et dans l’avril perpétuel de l’âme les embûches de lumière

qui s’éloignent trop du sang

dans ses grands oracles verts il sait nous garder transparents

retranchés aux persiennes de nos paupières

il a pour l’expectative du ciel des gestes maternels

où tout le perdu se retrouve là-haut

plus grand

sans négliger les rives et l’or des étapes intermédiaires

et l’introduction vers le bleu-dehors qui est une danse

il fallait bien ce pays-là quand j’y pense

ce murmure de sève et ce centre de joie

il me fallait ton rire qui se cogne de quille en quille

dans l’azur complice

pour que jamais je ne renonce à demeurer

un oiseau

Barbara Auzou

Esprit de la forêt / Une aquarelle de Francine Hamelin accompagnée de mon poème

Esprit de la forêt / Une aquarelle de Francine Hamelin

Et Francine Hamelin c’est ici:


on s’allonge toute une vie

dans les craquements du bois

et dans l’universelle indifférence

sans renoncer jamais à sa forêt première

à ses innocentes futaies

nous ne sommes faits ni pour la hache

ni pour le regret

et mon plus grand souci de toi aura été

cette traversée de l’ardeur

où j’entends le silence venir du plus loin 

de ton visage

amour coeur battant et poumon vert

d’écorces en écorces formes faciles et fières

sans charnières sans attaches

où la lumière prend feu

je te serre par le vent sans te plier

par l’oiseau et par la pensée instable

je te serre par l’abeille par la bruyère

par les cheveux longs du mystère

dans la grâce de ce qui a consenti

tout se tient et tout se tait

les arbres que le poème a pu sauver

les pierres chargées de mousses et puis d’oubli

par le rameau des bras unis

la joie simple monte jusqu’à son faîte désirable

Barbara Auzou

L’oiseau familier / Une aquarelle de Francine Hamelin accompagnée de mon poème

L’oiseau familier / Une aquarelle de Francine Hamelin

Et Francine Hamelin c’est ici:


mon âme est une plaine flexible

qui converse avec des arbres sans âge

une lucarne qui tord l’espace

parce qu’il y a toujours un projet de résistance

quelque part dans l’ordre du monde

pour épuiser le poids du temps

et pourvoir à la négligence du fruit

parce qu’il y toujours une place

pour l’oiseau indolore frotté

au vieux bois du silence

pour la paix blonde d’un idéal

et l’angle familier du ciel ou nidifie

l’évidence

mon âme ne sait se déprendre du bleu

ni du feu nomade dans le midi militant

ça sent l’herbe à intervalles réguliers

et puis l’enfance

c’est ainsi que l’on se tait au crépuscule

de la parole vaine

quand l’ombre de l’autre

ce quelque chose avec des ailes

s’endort en pelote de sel sur notre peau

réconciliée

Barbara Auzou 

Douceur / Une aquarelle de Francine Hamelin accompagnée de mon poème

Douceur / Une aquarelle de Francine Hamelin

Et Francine Hamelin c’est ici:

l’existence nous regarde un brin

continuer d’être sans tomber

quand bien même tout nous porterait

ailleurs

et que l’absence nous guette

de l’énorme pays de nos vies brûlées

on soutire pourtant quelques sommeils sans alarmes

quelques soleils gonflés d’amour

une zone franche et sans drame

où les nuits sont sœurs du jour

je ne doute pas un instant de l’extrême douceur

qui se brise de transparences par charité

qui assoie son autorité par son seul sourire 

ni du temps couché contre le temps

couvant ses bleus de hauteur 

pour mieux circonscrire l’éternité

et puisque tout nous dure

et puisque rien ne nous dure

je t’offrirai un arbre un cheval une île intérieure

pour le pouls de nos démesures

une fleur fière en sa perfection artisanale

posée toute simple sur une corbeille d’enfance

Barbara Auzou

Le temps nous rêve / Une aquarelle de Francine Hamelin accompagnée de mon poème

Le temps nous rêve / Une aquarelle de Francine Hamelin

Et Francine Hamelin c’est ici

couche toi contre mon flanc

bois mon silence à même la plaie

à l’abri des circonstances

ils peuvent autant qu’ils veulent déclarer

notre idéalisme révolu

ils peuvent par le prisme de leurs mots acérés

par le prétexte de leur boussole affolée

déraciner l’arbre artériel

le mettre à nu le laisser seul

notre lumière est belle

notre lumière est blonde d’un vent d’abeilles

qui ramène la chair à la faim

la faim au chemin

l’ombre au soleil partout

non ce n’est pas un mirage

que cette douceur tout entière en son centre serrée

ce ne sont pas mirages que les gestes de l’amour

que l’on apprend dans la facilité des fleurs

couche toi contre mon flanc

dans un lit centenaire restitué à nos rêves

offrons-les au mufle du matin qui veut jouer

érigeons-les au cœur de notre horloge exacte

qui veut chanter sans rien céder de nous

Barbara Auzou

Alchimie / Une sculpture de Francine Hamelin accompagnée de mon poème

Alchimie/ Une sculpture de Francine Hamelin

Et Francine Hamelin c’est ici :


viens par le vent et par l’envie

partout l’instinct nous dénonce

et le temps nous ment

seul nous dure l’émoi

ce pacte de sel où l’abîme se blottit

avec gratitude

l’insolite et le familier se pendent ensemble

à la jupe du matin

et tour à tour s’affairent à ordonner

de l’entente les signes nécessaires

les chemins réciproques sont semés

de paroles claires

 la peau de l’oiseau sur l’aile du fruit

boit l’éternel par habitude

puis se tait

ravie

il faut jouer encore

l’herbe mange l’instant ressaisi

sur nos âmes sur nos corps

sur un infime morceau de ciel

qui ressemble à s’y méprendre

à la frange rose de l’alchimie

été perpétuel bouches de lait

branches de figues éclatées

dont nos mains sont pleines

Barbara Auzou

Elfe solaire / Une aquarelle de Francine Hamelin accompagnée de mon poème

Elfe solaire / Une aquarelle de Francine Hamelin

Et Francine Hamelin c’est ici:

viens que je te dise

la vie se déroule ailleurs

elle est fleur sans slogan 

qui commence sans nous les travaux

du jour

et l’amour un bien proche

qui soustrait du temps au temps

et il n’est pas étonnant qu’on en pleure

quand on y sent battre le coeur

fauve de nos attaches anciennes

il est temps de risquer un arbre auprès de nous

une douceur de lilas sans cesse recommencée

une ronde tribale dans la marjolaine

comme des enfants curieux qui écoutent

aux portes de la terre le creuset de clairs

événements où l’épi se défait et se reforme

sentant la raison revenir avec tous ses grains

il est pré levé au ponant

oiseau posé sur une joue odorante un matin

qui ne veut rien que ce bleu qui tremble sous ses doigts

vois comme le monde n’a plus d’heures 

dans nos mains solaires

on pourra y coucher notre belle ébriété

dans un seul murmure de clepsydre

dans un domaine de langues analogues 

qu’encorbellent effrontément

de grands mûriers

Barbara Auzou