Entre 1939 et la fin des années 1980 en Espagne, quelque trois cent mille bébés ont été volés à leurs parents, pour être adoptés illégalement. Au plus près des victimes, ce documentaire éclaire cette sinistre affaire, héritage du franquisme.
Quand Clara a accouché à 14 ans, la maternité lui a annoncé la mort de son fils. Un quart de siècle plus tard, elle découvre, en état de choc, que son bébé a en réalité survécu et qu’il s’agit d’une fille, adoptée en toute illégalité. Alicia, elle, a appris à la mort de son père qu’elle avait été arrachée à la naissance à sa mère biologique pour être confiée à ses parents adoptifs en mal d’enfants. Entre 1939 et la fin des années 1980, environ trois cent mille bébés ont ainsi été volés en Espagne. Mis en place sous Franco avec la bénédiction de l’Église catholique et en particulier de l’Opus Dei, ce trafic abject, auquel ont été mêlés des religieux, des médecins, des sages-femmes, des avocats ou encore des assistantes sociales, avait à l’origine pour objectif de priver les parents réputés communistes de leur progéniture, pour éviter qu’ils ne lui transmettent leurs idées de gauche. Mais ces réseaux mafieux ont perduré après la mort du Caudillo, exploitant la détresse de mères célibataires et de couples stériles. Comme le révélait un reportage dès 1982, des bébés morts, conservés dans des frigos, étaient même présentés aux parents afin qu’ils ne doutent pas de la mort de leur nouveau-né.
Passé occulté
En recueillant la douleur de Clara et d’Alicia qui tentent, avec une association de victimes, d’obtenir justice, le film éclaire les dessous de cette affaire, sordide héritage du franquisme. Sur les traces d’Enrique J. Vila Torres, lui-même enfant volé et avocat désormais dédié à cette cause, il montre aussi combien l’Espagne, dont les élites franquistes ont négocié en 1977 leur amnistie en échange de la démocratie, peine à affronter son passé et à juger les responsables impliqués. Un document édifiant alors que, malgré l’accumulation de preuves, aucun procès n’a encore abouti.
LE VASTE MONDE
Où faut-il qu’on aille
Pour changer de paille
Si l’on est le feu
À moins qu’il ne faille
Si l’on est la paille
Fuir avec le feu
La paille est si tendre
Mais vouloir l’étendre Étendra le feu
Qu’on tente d’étreindre
Or il faut l’éteindre
Le long pour l’un pour l’autre est court
II y a deux sortes de gens
L’une est pour l’eau comme un barrage et l’autre fuit comme l’argent
Le mot-à-mot du mot amour à quoi bon courir à sa suite
Il est resté dans la
Dordogne avec le bruit prompt de la truite
Au détour des arbres profonds devant une maison perchée
Nous avions rêvé tout un jour d’une vie au bord d’un rocher
La barque à l’amarre
Dort au mort des mares
Dans l’ombre qui mue
Feuillards et ramures
La fraîcheur murmure
Et rien ne remue
Sauf qu’une main lasse
Un instant déplace
Un instant pas plus
La rame qui glisse
Sur les cailloux lisses
Comme un roman lu
Si jamais plus tard tu reviens par ce pays jonché de pierres
Si jamais tu revois un soir les îles que fait la rivière
Si tu retrouves dans l’été les bras noirs qu’ont ici les nuits
Et si tu n’es pas seule alors dis-lui de s’écarter dis-lui
De s’é-car-ter le temps de renouer ce vieux songe illusoire
Puis fais porter le mot amour et le reste au brisoir
On a beau changer d’horizon
Le cœur garde ses désaccords
Des gens des gens des gens encore
De toute cette déraison
Il n’est resté que les décors
Elle amenait à la maison
Des paltoquets et des pécores
Je feignais lire
YInprekor
Comme un jour fuit une saison
Il n’est resté que les décors
On a beau changer de poison
Tous les breuvages s’édulcorent
Toutes les larmes s’évaporent
Des fièvres et des guérisons
Il n’est resté que les décors
On a beau changer de prison
On traîne son âme et son corps
Les mois passent marquant le score
De tant d’atroces trahisons
II n’est resté que les décors
Le cœur ce pain que nous brisons
Que les sansonnets le picorent
J’aurais dû partir j’avais tort
Aux lueurs des derniers tisons
Il n’est resté que les décors
À chaque gare de poussière les buffles de cuir bouilli
Les gardes qui font un remuement d’armes et bottes noires
Devant les buffets de piments et d’orgeat
Des femmes sur leurs ballots sombres
Yeux d’olive visages d’huile
Quel est donc ce pays de soif et de bucrânes
Nous roulons sur la terre cuite.
Où sommes-nous
Il n’y a sur la toile énorme qu’un âne et qu’un homme
Une cruche d’ombre un pain bis un oignon
Et le vallonnement uniforme où nous nous éloignons
Le train s’en va comme un caniche
Sous le couchant drapeau de
Catalogne
Primo de
Rivera
En ce temps-là dans les hôtels les domestiques
Surveillaient les voyageurs par le trou de la serrure
Afin que tout fût bien selon l’Église
Dans les premiers froids de
Madrid
J’habitais la
Puerta del
Sol
Cette place comme un grand vide
Attendait quelque nouveau
Cid
Dont le manteau jonchât le sol
Et recouvrît ces gueux sordides
Qu’on jette aux mendiants l’obole
Montrez-moi le peuple espagnol
Primo de
Rivera
Il y avait au
Prado ce qui ne se montrait pas dans
J’ai reconnu le garçon d’hôtel espionnant à la porte
Dans un dessin de
Goya
Ce peintre apprend mieux que personne
L’Espagne et son colin-maillard
Mais par-dessus tout il m’étonne
Me serre le cœur et lui donne
Le secret de ce cauchemar
Par cette épouvante d’automne
Dans un tableau fait sur le tard
Le grand goudron de
Gibraltar
Primo de
Rivera
J’ai parcouru les sierras
Où la procession des villes se lamente
Tolède
Ségovie
Avila
Salamanque
Alcala de
Henarès
Passant les bourgs de terre cuite
Les labours perchés dans les airs
Sur un chemin qui fait des huit
Comme aux doigts maigres des jésuites
Leur interminable rosaire
Le vent qui met les rois en fuite
Fouette un bourricot de misère
Vers l’Escorial-au-Désert
Primo de
Rivera
Une halte de chemin de fer à mi-route entre l’hiver et l’été
Entre la
Castille et l’Andalousie
À l’échiné des monts à la charnière sarrasine
Un jeune aveugle a chanté
D’où se peut-il qu’un enfant tire
Ce terrible et long crescendo
C’est la plainte qu’on ne peut dire
Qui des entrailles doit sortir
La nuit arrachant son bandeau
C’est le cri du peuple martyr
Qui vous enfonce dans le dos
Le poignard du cante jondo
Primo de
Rivera
Primo de
Rivera
Primo de
Rivera
ô bruit des wagons dans la montagne bruit des roues
Et tout à coup c’est le mois d’août
Un souffle sort on ne sait d’où
L’odeur douce des fleurs d’orange
Le grand soir maure de
Cordoue
Qu’au son des guitares nomades
La gitane mime l’amour
Les cheveux bleuis de pommade
L’œil fendu de
Schéhérazade
Et le pied de
Boudroulboudour
Il se fait soudain dans
Grenade
Que saoule une nuit de vin lourd
Un silence profond et sourd
Primo de
Rivera
Le verre est par terre
Un sang coule coule
Dommage le vin
Du bon vin
Lorca
Lorquito
Lorca c’était du vin rouge
Du bon vin gitan
Qui vivra verra le temps roule roule
Qui vivra verra quel sang coulera
Quand il sera temps
Sans parler du verre
Qui vivra verra
Il se fait soudain dans
Grenade
Que saoule une nuit de sang lourd
Une terrible promenade
Il se fait soudain dans
Grenade
Un grand silence de tambours
Louis Aragon
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merci pour ce grand silence de tambours…sur mon matin de neige…Bonne journée à toi, Alain.
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Toujours marqué du doigt centré sur la n’aime ciblé humaniste, tu poursuis plus avant ton avance dans les étapes d’un chemin mien.
Je ne crois pas que l’histoire ait connu pareil complot de destruction collective. La complicité d’Hitler, Mussolini et Franco, a hourdé au début des années 30 cette vaste entreprise au su et vu de toute l’Europe…qui s’est refusée à le reconnaître…c’est ainsi que les
Hommes vivent❤️
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Quelle horreur…
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Oui…
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La fièvre ? Certainement elle qui oublie d’hourdir….
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A reblogué ceci sur Le Bien-Etre au bout des Doigts.
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Lire aussi « Mala Vida » de Marc Fernandez sur le sujet ! même si le livre n’explore pas l’enquête à fond il est sur ce sujet passionnant
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Merci à vous!
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Argh…pourquoi si tard. Ca sent le Arte+7 tout ça 😀
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Je connaissais cette horreur, et j’ai une amie dont la mère n’a jamais su ce qu’était devenu son enfant soit disant « mort né » (elle n’a jamais vu le corps de ce bébé et soupçonnait cette action criminelle… mon amie est malade de l’absence de ce frère disparu mystérieusement).
J’ai vu un docu (avec quelques témoignages de victimes) il y a quelques jours, sur les Lebensborns de Himmler. Je n’en avais jamais entendu parler. L’escalade dans l’ignominie…
En Italie, le terrible film de P.Paolo Pasolini (Salo ou les 120 journées de Sodome) a été longtemps interdit.
Il y a quelques jours également j’ai vu un docu sur les époux Klarsfeld (les avocats père et fils sont plus connus que la merveilleuse Beate qui fait honneur à nous autres femmes). Voilà, il faut se réveiller… la peste est toujours là, au sein de l’Europe, et ne demande qu’à se réveiller. Merci Barbara !
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