Pisser dans un violon…

uku1Voilà une expression que j’utilise assez souvent et je l’ai utilisée en juin dernier dans l’une de mes classes (pas bien, je sais) totalement interloquée et qui m’en a demandé la signification. Facile. quant à son origine, elle demeure incertaine!

Ne servir à rien.
Faire quelque chose de complètement inutile, inefficace.

Origine

Cette expression s’emploie très souvent dans des formes comme c’est comme si on pissait dans un violon ou bien autant pisser dans un violon ! pour indiquer l’inutilité totale de l’action ainsi qualifiée.

Pisser, mot qui vient du bas latin pissiare (pour « uriner »), n’est considéré comme vulgaire que depuis le XIXe siècle.
Auparavant, son usage était aussi naturel que la fonction elle-même, le mot uriner étant réservé au milieu médical.
De nos jours, dans le langage courant, on ne dit ni uriner, vu comme trop pédant (« Marie-Chantal, j’arrive dans deux minutes, je m’en vais d’abord uriner quelque peu »), ni pisser, trop vulgaire, mais plutôt faire pipi considéré comme acceptable et venu du monde des enfants.

Il est certain que, si on veut produire une agréable mélodie, pisser dans un violon ne servira vraiment pas à grand chose, même en visant les cordes et en y baladant le jet.
Mais pourquoi une telle association ? Pourquoi un violon au lieu d’un banjo, d’une pelle à tarte ou d’une passoire ?
Telle quelle, l’expression date de la fin du XIXe siècle, et rien ne l’explique vraiment.

Mais Alain Rey suppose que le verbe pisser n’est apparu, par plaisanterie, qu’en remplacement d’un verbe comme souffler ou siffler.
La locution d’origine aurait alors été souffler dans un violon (dont on trouve effectivement une utilisation dans un numéro de l’Apiculteur de 1901), action dont l’inutilité est flagrante lorsqu’on sait que souffler dans une flûte ou une trompette permet effectivement de produire de la musique, mais qu’avec un violon, le résultat devient tout de suite nettement moins probant.

 

 

14 réflexions sur “Pisser dans un violon…

  1. Amusant, car il n’y a pas trois semaines que j’ai fait une petite enquête sur ce sujet parfaitement futile (donc distrayant). Même si ça revêt un certain caractère de logique (confusion des instruments à cordes et à vent), il est parfaitement faux de prétendre que pisser dans un violon serait une déformation de souffler dans un violon. Parce qu’on ne trouve aucun exemple de « souffler dans un violon » au XIXe, alors que déjà, en 1830, on parlait depuis longtemps de « pisser dans un violon ». D’autre part, l’exemple de L’Apiculteur que vous citez le prouve, car c’est dans une réédition de 1901 que le texte original de 1867 (« ça ne fait pas plus d’effet qu’à pisser dans un violon ») est pudiquement transformé en « ça ne fait pas plus d’effet que souffler dans un violon ». C’est donc, contrairement à ce que prétend Rey, « pisser dans un violon » qui est antérieur. Voir le Dictionnaire de la Langue verte d’Alfred Delvau, 1883: « Pisser dans un violon. Perdre son temps à vouloir faire quelque chose » (p.541)

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    • J’ajoute que certainement, pour parler pédantesque, on ne fait pas appel au « champ sémantique » que Rey croit. Tout indique (voir Delvau, Alphonse Allais, etc.) que « pisse » est délibérément choisi comme le symbole de la chose de moindre valeur, négligeable, inutile (« c’est de la pisse d’âne », « de chat »…: ça ne vaut rien, ça ne sert à rien, c’est de la camelote, c’est inefficace) Donc c’est faire quelque chose d’inutile avec un instrument de valeur dont l’emploi réclame une compétence (le violon).

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